Marginalisation du secteur primaire en milieu rural
Nos villages ont connu ces cinquante dernières années de profondes mutations qui portent sur les plans social, environnemental, politique et économique, entrainant un bouleversement des modes de vies dans les villages.
L'économie des zones rurales et l'emploi des personnes qui y vivent ne sont plus essentiellement dépendants du secteur primaire et l'importance relative de celui-ci est en diminution au profit du développement des fonctions de détente, de loisirs, de dépaysement et de vie alternative.
Pour l’ensemble de la Région wallonne, le nombre d’exploitations a enregistré une diminution de plus de 50% en 20 ans pour s’établir à 12832 exploitations en 2013.
Comparativement aux autres secteurs de l’économie wallonne, il apparaît que la population active est nettement plus âgée en agriculture. En effet plus de 65% des exploitants ont plus de 50 ans.
Seulement 21% des exploitants de plus de 50 ans ont un successeur, 38% ne savent pas s’ils en auront un et 40% savent déjà qu’ils n’auront pas de successeur. En 2013, la part de la population active dans le secteur agricole ne représentait plus que 2% de la population active wallonne (SPW – DGO3, 2015). Cette évolution rend compte de l’importance de l’exode agricole en Région wallonne.
Si le nombre d'exploitations agricoles a fortement diminué ces dernières décennies, la superficie des terres cultivées, elle, n’a pas diminué dans la même proportion, et les terres cultivées se sont concentrées dans un nombre de plus en plus réduit de mains. Ainsi, la superficie moyenne par exploitation a plus que doublé entre 1990 et 2013; passant de 26 à 56 ha.
Flambée des prix de la terre et difficulté d'accès pour les jeunes
Paradoxalement à la forte diminution du nombre d’exploitations et au vieillissement de population des agriculteurs, l’accès à la terre est devenu une problématique capitale de notre agriculture. Une enquête de 2014 de la Commission européenne permet de mesurer l'ampleur du phénomène. Environ 60% des jeunes agriculteurs dans l'Union européenne citent comme problèmes principaux la disponibilité de terres à acheter ou à louer. En Belgique, cette proportion atteint même 80%.
À cette difficulté s’ajoutent celles auxquelles se confrontent les nouveaux actifs, extérieurs au monde agricole (dits « Hors Cadre Familial »).
Installations hors cadre
Pour venir en soutien aux agriculteurs, et en connaissance des spécificités du métier et des difficultés actuelles au lancement réussi de leur activité, de plus en plus d’initiatives voient le jour. L’espace-test en fait partie. Pour favoriser les chances de réussite de l’installation, une série de partenaires créent un dispositif où des agriculteurs en devenir peuvent tester leur projet agricole en conditions presque réelles tout en bénéficiant d’un cadre juridique protecteur, d’un terrain, d’outils et d’un accompagnement personnalisé. Ce modèle s’apparente à celui des couveuses d’activités qui fonctionnent dans d’autres secteurs économiques. Après le passage des porteurs de projet en espace test, il convient de favoriser l’accès aux terres agricoles pour ceux qui sont confrontés à la spéculation foncière.
Reconnaissance de la multifonctionnalité de l’agriculture
Le caractère multifonctionnel de l’agriculture n’est pas nouveau et consiste à reconnaître que les agriculteurs possèdent plusieurs fonctions en dehors de leur fonction première qui est de produire des aliments et des matières premières. Selon la Commission Européenne, on peut distinguer trois types de fonctions principales : la production d’aliments et de fibres, la préservation de l’environnement rural et des paysages et la contribution à la vitalité des zones rurales et à l’équilibre du développement territorial.
Plus généralement, les activités agricoles et la diversification de l’exploitation peuvent contribuer à un développement territorial équilibré en maintenant la viabilité des zones rurales. Un secteur agricole solide est donc nécessaire pour supporter une société et une économie rurales saines. Le modèle basé sur la multifonctionnalité repose sur la possibilité pour les agriculteurs de générer de nouvelles activités économiques et des revenus alternatifs grâce à ces autres fonctions. Cela est nécessaire pour maintenir le secteur agricole en place.
Le concept de multifonctionnalité représente également l’idée qu’un acte de production peut amener des effets secondaires qui peuvent être positifs ou négatifs. Ces effets secondaires se réfèrent à la production de biens publics et donc les discussions qui tournent autour du concept de multifonctionnalité font appel aux notions de territoire et de services publics. Ces services ne seront pas produits en suffisance s’ils ne sont pas rémunérés et afin de s’assurer la réalisation de ces services, une intervention publique est nécessaire. Au sein de l’Union Européenne, ce concept justifie donc la continuité de la politique agricole commune et des paiements des subsides. C’est dans ce sens que le Règlement européen de Développement Rural de la PAC prévoit des mesures destinées à compenser les agriculteurs producteurs de biens publics désirés.
Agriculture biologique
L'agriculture biologique gagne progressivement en importance en Belgique et les chiffres du nombre d'exploitations et de superficies cultivées montrent que ce phénomène est davantage wallon. En 2014, la superficie sous contrôle (bio et conversion) à l’échelon du Royaume couvre près de 66 693 ha (dont 61 551 ha en Wallonie), soit une augmentation de près de 61 % en cinq ans (41 271 ha en 2009). Cet accroissement est dû à une progression en Wallonie (+7,4 % de 2013 à 2014). En Flandre , les surfaces en agriculture biologique sont en léger recul (-0,5 %). Un cap a été franchi en 2014 car à présent un dixième des agriculteurs wallons font de l’agriculture biologique. La part de la superficie sous contrôle par rapport à la SAU recensée, progresse en Wallonie et atteint 8.6 %.
Il est à noter que l’objectif fixé dans le « Contrat d’avenir pour la Wallonie » (CAWA) à 10 % de la SAU recensée en Wallonie convertie au mode de production biologique pour 2010 n’a pas été atteint. Cependant,Le Gouvernement wallon s’est doté en juillet 2013 d’un Plan Stratégique Bio qui fixe des objectifs d’évolution à l’horizon 2020, à savoir : 14% de la surface agricole utile cultivés selon les règles du bio, 1750 exploitations sous contrôle bio et atteindre 3% du total des produits alimentaires achetés. A près de 4 ans de l’échéance du plan, l’objectif est réalisé à 60 % pour les superficies et à 75 % en nombre d’exploitations.
Sur base de la progression actuelle, les objectifs du Plan Bio peuvent être revus à la hausse et compter 2.000 exploitations à l’horizon 2020. Le Ministre COLLIN veut doubler la surface actuelle pour 2020 et donc atteindre 17,4% de la surface agricole utile cultivés selon les règles du bio. En 2030, l’objectif serait d’atteindre les 25% (source : Site web du Ministre de l’agriculture, René Collin, consulté en septembre 2016).
Crises alimentaires et industrialisation abusive des produits alimentaires sont des éléments ayant conduit de nombreuses personnes à se tourner vers des aliments biologiques de qualité. Il s’agit d’un processus de réassurance par lequel le circuit court constitue en lui-même une garantie de qualité car il limite l’intervention d’un intermédiaire marchand largement accusé de capter la rente ou de dénaturer le produit.
Circuits courts
Face aux systèmes de production et distribution globalisés, des alternatives ayant le souci de réduire la distance entre producteurs et consommateurs voient le jour. A côté du marché local qui a toujours existé, de nouveaux modes de vente, en circuits courts, apparaissent : la vente directe à la ferme, la vente via internet, les comptoirs fermiers, les groupes d’achats communs et groupes d’achats solidaires, les paniers, etc.
Par « court » on entend une distance faible entre le producteur et le consommateur. La distance de 80 km est citée par l’INRA comme référence. « Court » signifie aussi qu’il n’y a plus qu’un seul, voire pas du tout d’intermédiaire entre le producteur et le consommateur.
Agriculture de précision et automatisation
L’agriculture de précision, l'automatisation et l'acquisiton/traitement de grandes quantités de données par le biais de l'utilisation des TIC (technologies d'information et de communication) font partie des outils mis à la disposition de l'agriculteur pour évoluer dans la philosophie du développement durable (EU, 2014). La précision est basée sur l'utilisation de satellites et l'automatisation est incarnée par les robots et les drones.
L'environnement bénéficie de cette approche qui permet une gestion plus rigoureuse des intrants comme les engrais, les produits phytosanitaires, l'eau d'irrigation ou l'énergie (Schieffer et Dillon, 2013). L'agriculteur en tire également de grands avantages en terme de confort de vie. Les investissements lourds requis doivent s'inscrire dans un plan financier assurant la rentabilité de l'exploitation par un gain de productivité et/ou d'économie sur certains entrants.
Développement de l'agriculture urbaine
L’agriculture urbaine et péri-urbaine consiste à cultiver des plantes, à élever des animaux, à les transformer et les distribuer à l’intérieur et en périphérie de la ville. Elle est multiple et peut prendre la forme de potagers urbains individuels ou communautaires au sol, de jardins de production sur les toits et même de serres de production intensive en hydroponie sur les toits ou dans des fermes verticales et d’élevage d’animaux de petite à moyenne taille.
La population mondiale sera bientôt composée de plus de 50% d’urbains, et les terres cultivables disponibles diminuent. Cette situation interpelle, et réinvestir des surfaces non conventionnelles en villes, pour y produire des denrées, pourrait contribuer en partie à nourrir l’humanité et plus particulièrement les citadins.
L’agriculture urbaine est monnaie courante dans de nombreuses grandes villes d’Afrique et d’Asie. Quant aux villes d’Europe, l’agriculture y était bien présente au Moyen-Âge, mais il se pourrait bien que nous la revoyons fleurir dans les années à venir (Servigne P. 2012). Dans toutes les grandes villes d’Europe des projets intégrant l’agriculture urbaine voient le jour. La Belgique n’est pas en reste et des villes comme Bruxelles, Liège, Gand montrent l’exemple. Chaque année, l’Europe investit 111 milliards dans le secteur de l’immobilier. En Belgique, ce secteur se caractérise par la construction annuelle de plus de 7 000 bâtiments résidentiels et non résidentiels. Ce secteur est donc un levier essentiel pour aboutir à l’intégration réussie de l’agriculture urbaine et répondre aux défis d’aujourd’hui et de demain. (GxABT, 2015)
Agriculture sociale
D'autres références moins récentes :
Belges :